Lettre envoyée à Madame Chantal Brunel

Madame.

J'habite la Seine-et-Marne, mais j'ai la chance de résider dans une autre circonscription que la vôtre.

Comme bon nombre de mes concitoyens, vos propos tenus hier m'ont atterré à plusieurs niveaux.

D'abord par ce qu'ils véhiculent comme mépris de l'autre, refus de l'empathie minimale vis-à-vis de personnes en grande précarité.

Ensuite par ce qu'ils montrent de bêtise ordinaire, dans la bouche de quelqu'un que l'on a du mal à continuer à qualifier d'"élue du peuple".

Je voudrais vous dire que l'ai passé une grande partie de ces 30 dernières années dans des camps de réfugiés dans de nombreux pays affectés par la guerre, le famine, l'instabilité politique, travaillant avec une grande ONG de secours médical... Je considère les nombreuses rencontres que j'ai eues -et ai encore- l'occasion d'y faire comme un privilège.

Il faut avoir passé un moment à écouter un de ces 'candidats au départ' à Lampeduza, Calais, Ceuta, Mae Sod, Kaboul,... pour mesurer la l'infinie détresse de ces personnes,

pour comprendre qu'on ne laisse pas derrière soi sa vie, ses amis, sa famille, sa culture... pour aller jouir au soleil (?) d'une protection sociale qui se réduit comme peau de chagrin, pour aller devenir une ombre sans identité bien précise, sans existence reconnue dans une société dans laquelle tout ce qu'ils peuvent attendre se résume à quelques mètres carrés, un travail pénible, et une poignée d'euros, dont l'essentiel repartira permettre la survie de ceux qu'on a laissés derrière.

Ca ressemble quand même plus à du sens du sacrifice qu'à quoi que soit d'autre!

Alors oui, de temps en temps 'ça dérape', et le droit doit être dit. La détresse ne justifie nullement la malhonnêteté ou la violence, et le laxisme n'est certainement pas une option acceptable. La loi est là pour protéger l'ensemble de la société. Laissons la agir avec discernement.

Je vous saurais vraiment gré à l'avenir, madame, de nous épargner ce type de discours. Si votre projet politique se réduit à ce discours, il importera que les urnes parlent!

Gilles Delmas