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13 janvier 2016 3 13 /01 /janvier /2016 13:39

L’état d’urgence, « nouvel outil contre les sans-papiers » ? C’est ce que redoute le collectif Réseau éducation sans frontières (RESF) en Isère, où deux familles Roms ont fait l’objet de perquisitions début décembre. « Il semble évident qu’on assiste à une volonté de terroriser les familles afin de les faire disparaître », estime RESF. De fait, l’une d’entre elles s’est volatilisée dès le lendemain de sa perquisition, le 9 décembre, et alors qu’elle était suivie depuis plus de deux ans par RESF.

La seconde famille redoute quant à elle d’être expulsée à tout moment. « Stressed, stressed. » Elvira n’a pas d’autre mot pour qualifier son état depuis que, le 10 décembre, au petit matin, des gendarmes ont débarqué chez elle. Cette femme de 35 ans, originaire de Serbie et appartenant à la communauté Rom, occupe un appartement avec son mari et ses trois enfants dans l'Isère. « Pistolets, cagoulés, ma fille pleurait, stressed beaucoup… », reprend Elvira. Le père de famille, Kenzat, lui aussi Rom mais originaire du Kosovo, raconte comment il a été menotté et mis à terre avant que son appartement soit intégralement fouillé.

« Elle était orthodoxe avant. Ils m’ont demandé pourquoi elle était musulmane »

Les pièces sont filmées, les téléphones du couple aspirés, de même que l’ordinateur et des disques durs trouvés dans un meuble télé. Kenzat les a ressortis pour prouver sa bonne foi et qu’il n’a rien d’un terroriste : « Tous les jours, je fais les poubelles et je revends à la brocante », explique celui qui n’a pas de permis de travail. Arrivée en France en 2012, la famille s’est vu refuser l’asile politique ainsi qu’une demande de titre de séjour. Elle explique que sa maison a été détruite pendant la guerre au Kosovo, l’obligeant à fuir en 1999 vers la Serbie. Puis vers la France en 2012. Mais le Kosovo est désormais inscrit sur la liste des pays sûrs de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Les demandes d'asiles sont systématiquement rejetées.

Jeudi 10 décembre, Kenzat rapporte que les gendarmes ont fouillé les cartables de ses enfants lorsque ceux-ci s’apprêtaient à partir pour l’école. Ils sont aussi tombés sur un petit écrin à bijoux dans lequel il range deux croix. « La madame, elle était orthodoxe avant, indique Kenzat. Ils m’ont demandé pourquoi elle était musulmane. Je leur ai répondu que c’était son choix. » Les gendarmes veulent aussi savoir si Elvira va à la mosquée et si Kenzat est imam. Elle répond par la négative, lui, explique qu’il lui arrive de s’occuper du prêche dans une salle de prière où se retrouvent des Roms de Bosnie, Serbie, Albanie ou Macédoine : « Je suis la réserve quand l’imam est absent, tente-t-il de faire comprendre, parce que je parle bien le romani littéraire. » Comme pour prouver son intégrité, Kenzat ajoute qu’avec ses coreligionnaires, il « fait aussi des bonnes actions, auprès d’orthodoxes ou de catholiques. On a donné à manger à des Roumains dans un campement, on a donné des sandwiches à des gens qui dorment à la gare… »

Faciliter la recherche des passeports de la famille pour organiser leur expulsion ?

Reste qu’un mois après la perquisition de leur domicile - au cours de laquelle aucun interprète n’avait été dépêché - Kenzat et Elvira ignorent pourquoi ils ont été visés. Sollicitée par Le Monde, la préfecture de l’Isère refuse de faire connaître ses motivations. « Mais la personne a bien vu l’ordre de perquisition et le procès-verbal puisqu’elle les a signés, précise le service de communication. Elle peut demander à les consulter. » Le jour J, aucun exemplaire n’a été laissé à la famille.

Le 22 décembre, une assignation à résidence de 45 jours renouvelable a en revanche été délivrée en mains propres à Kenzat et Elvira. Elle n’est pas liée à l’état d’urgence mais au code des étrangers et à l’obligation de quitter le territoire français (OQTF) notifiée à la famille la veille de la perquisition. « La perquisition avait peut-être pour but de faciliter la recherche des passeports de la famille » pour organiser leur expulsion, suppose une militante de RESF.

Le 7 janvier, des gendarmes se sont une nouvelle fois rendus au domicile de la famille « pour leur apporter la photocopie de la notification d’assignation à résidence, ajoute cette militante. Cette "visite" a été l’occasion de mettre la pression sur la famille, en leur demandant de venir le lendemain à la gendarmerie avec leur passeport ».

« La perquisition les a complètement laminés »

Lorsqu’ils vont pointer au commissariat, deux fois par semaine, Kenzat et Elvira rapportent qu’une fonctionnaire de gendarmerie leur réclame des photos des enfants. Le père est persuadé que c’est pour préparer des laissez-passer consulaires en vue de leur expulsion. Alors il s’y refuse. « Dès qu’un voisin sonne à la porte, j’ai peur que ça soit la police qui revient », confie Elvira tandis que son époux répète : « Je suis venu ici parce que la France, c’est la liberté. »

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Published by Fontenay - Diversité